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13 mars 2018 2 13 /03 /mars /2018 14:43

LA CONVERGENCE DES LUTTES – POURQUOI ET COMMENT ?

 

  1. Pourquoi ?

Après tout, nous sommes tous différents, nous avons fait des choix idéologiques différents et nous ne percevons pas nos intérêts de la même manière. La tentation pourrait alors être grande de laisser ceux qui sont aux affaires se débrouiller. Après tout, ils ne feront pas beaucoup plus mal que leurs prédécesseurs.

Oui, mais, évidemment, il y a aussi des facteurs qui font que l’on ne peut pas tout simplement s’en foutre. L’auteur de ces lignes en voit au moins 4 :

  1. Le nombre de lois voté chaque année est considérable (Cf. les différents articles à ce sujet du magazine Capital). Or, bonnes ou mauvaises, cette multiplication et cet amoncellement nous pose finalement des problèmes dans notre vie quotidienne, sans parler, bien sûr des maires et des entrepreneurs. On aurait besoin, comme l’avait dit en 1966 le premier ministre de l’époque, Georges Pompidou, « qu’on arrête d’emmerder les français ». Ou alors, pour quelques lois rares mais bien réfléchies. On en est très loin.
  2. En termes de qualité de la vie démocratique, on peut dire ce qu’on veut des systèmes électoraux des autres pays, mais, chez nous, c’est pire. Dans un pays où 60% des députés appartiennent à un seul parti on est un peu entre l’Ouzbékistan et le Turkménistan. (Cf. S. Darré – Canalbog – « VIème république : la constitution de vos rêves »). Donc quelle légitimité ont-ils pour parler en notre nom ? Ils n’en ont presqu’aucune.
  3. Comme le montre l’OCDE, la France détient maintenant seule le record des prélèvements obligatoires à 45% du PIB. Et ce n’est pas pour investir dans les transports, la conquête spatiale, l’armée et la recherche sur le génome humain comme la Chine. Ni pour développer des universités de tout premier plan comme Singapour. Non, cette hausse continue de la dépense publique couplée à celle du déficit sert avant tout à payer la hausse des prestations sociales. On serait, normalement, mais il faut croire que les choses ont un peu changé, dans une situation pré insurrectionnelle décrite par Alexis de Tocqueville dans son livre magistral « l’Ancien régime et la révolution ».
  4. Enfin parce qu’on sait mieux maintenant, ce que l’élite politico-médiatique pense de nous, les gens d’en bas. Premier exemple, le livre de Patrick Buisson qui narre un dîner à l’Elysée avec Carla Bruni, Bernard Kouchner et Christine Ockrent. Que disent ces sommités ? Que nous sommes arcboutés sur nos traditions nationales et rétifs à la mondialisation et qu’il faudra en conséquence ouvrir grand les portes de l’immigration pour nous remplacer – tout simplement. Il y a d’autre part le livre de Valérie Trierweiler où on apprend que François Hollande traite les pauvres de « sans-dents », version moderne du « salauds de pauvres ». Plus récemment on a appris que Gérald Darmanin, à ce jour ministre du budget, utilisait ses fonctions pour exiger et obtenir des faveurs sexuelles – en toute impunité.

 

Nous ne sommes donc qu’une masse inerte, tandis qu’eux, les sachants, son seuls à savoir ce qui est bon. Encore qu’ils sont aussi écartelés par leur autre obsession : se faire réélire. Mais leur raisonnement est le suivant : c’est moi qui ai raison et en appliquant ma politique les choses vont aller mieux et je serai, dès lors, réélu. Où on se demande qui sont les idiots, en fait ? Sauf que leurs conneries nous coûtent cher aussi. On va donner ci-dessous les exemples les plus récents. Mais on ajoute aussi une cinquième raison.

 

Qu’est-ce que c’est que cette idée d’augmenter la CSG ? Il s’agit de prendre aux uns, les retraités et, pour une part, les fonctionnaires, pour donner aux autres, les actifs du privé et les professions libérales. Il s’agit de nous dresser les uns contre les autres, en somme. Dans le même ordre d’idée, ce qui est en train de se mettre en place est une suppression de la taxe d’habitation pour donner du pouvoir d’achat aux ménages au détriment des communes.

On est très loin de la notion de l’intérêt général qui était l’apanage du général de Gaulle et de Philippe Séguin. On est, quelques décennies après, dans le tout petit : des boutiquiers à courte vue.

 

Début 2018, à l’heure où on écrit ces lignes : outre la hausse de la CSG qui ampute les retraites, d’autres hausses sont, viennent d’être, ou vont bientôt être promulguées. A savoir (liste non exhaustive) :

  • Hausse du paquet de cigarettes d’1 euro
  • Hausse de la part taxe des carburants, 4 centimes par litre pour l’essence et 10 centimes pour le diesel
  • Hausse de la part taxe des factures de gaz, de pas moins de 40% !
  • Mise en place d’une nouvelle taxe sur les abris de jardin
  • Augmentation considérable des amendes liées à la conduite automobile (encore). Pose de 500 nouveaux radars prévue en 2018 qui devrait permettre de dépasser le milliard d’euros d’infractions par an
  • Augmentation très forte aussi des amendes liées, cette fois, au stationnement
  • Toujours les pauvres cons possesseurs d’une voiture : hausse substantielle du coût des contrôles techniques obligatoires

 

 

Du coté des interdictions deux principales sont en cours de promulgation : limitation de la vitesse à 80 kms /heure là où elle l’était à 90 et interdiction du glyphosate et, ça tombe bien car elles sont très symptomatiques de cet écart entre les préoccupations des dirigeants et celles des gens d’en bas.

 

La limitation de vitesse (les il faudrait dire car c’est un chapelet qu’on égrène au fil des années) résulte d’une loi générique sur les moyens de baisser la mortalité liée à la route. Mais a-t-on demandé à la population ce qu’elle en pensait, c’est-à-dire si les sacrifices en termes de libertés et de commodité en valaient la peine ? La réponse est non. On n’a jamais consulté les simples citoyens avant d’ériger la sécurité routière en grande cause nationale.

Mais comment consulter la population de manière honnête ? Ce n’est pas tout à fait simple à vrai dire, on y reviendra. Mais faire une pseudo expérience sur 4 routes dont on sait que les résultats seront inexploitables ce n’est pas une solution non plus. Un partout balle au centre.

 

L’autre interdiction est évidemment celle, à venir, du glyphosate. Le glyphosate est un désherbant puissant, aujourd’hui inévitable dans le cas d’une agriculture intensive, qui est, pour l’essentiel, la nôtre. Il a été déclaré cancérigène probable, puis non cancérigène dans d’autres études. Il est associé à Monsanto qui est le diable en personne. Donc c’est devenu très politique et ce que ne nous disent pas nos « responsables politiques » c’est que, si on accède aux demandes de tous les bien-pensants, les agriculteurs devront simplement employer beaucoup plus de produits un peu moins nocifs, mais carrément en plus grandes quantité. Résultat ?

 

Toujours sur le sujet de l’écologie dont on voit bien qu’on ne va pas le quitter tout de suite : la hausse des prix du gaz. Certes le gaz c’est polluant, cela émet des gaz à effet de serre. Mais tant que cela ? Alors non, pas forcément, il ne présente pas les risques du nucléaire et est beaucoup moins polluant que le pétrole et le charbon et il ne coûte pas cher sur le marché mondial. Alors pourquoi pénaliser à cette hauteur les français qui cherchent seulement à se chauffer pour pas trop cher ?

 

Sur ce sujet et pour faire le lien avec les hausses de prix des carburants, on doit évidemment citer ici la Loi de transition énergétique et les engagements internationaux pour réduire l’empreinte carbone. Et nous n’en sommes en quelque sorte qu’au début. D’autres hausses sont programmées qui vont continuer à réduire le pouvoir d’achat des ménages.

Mais là, les « responsables » marquent un point. Les enquêtes d’opinion montrent en effet que les français sont aujourd’hui convaincus par l’enjeu climatique. Mais sans que cela se reflète non plus dans les votes, spécialement à la présidentielle. Il est vrai que, en plus de ne pas être d’accord entre nous comme vu plus haut, nous sommes aussi très contradictoires y compris, bien sûr, avec nous-mêmes. Notons sur le diesel, par exemple, que malgré les avertissements des scientifiques, une majorité continuait à croire que les modèles les plus récents n’étaient pas nocifs. Le scandale Volkswagen n’a pu être révélé qu’après enquête aux USA.

 

Toute la question est alors celle de la démocratie que l’on illustre ici par cet exemple. Disons que les français veulent faire plus pour le climat. Disons que c’est acquis. Mais disons aussi qu’ils ne veulent pas s’appauvrir inutilement. Alors la question est de savoir où on met le curseur. Soit on s’en remet à la loi et à la force de celui qui gouverne. Soit on cherche des moyens pour consulter les gens d’en bas. Ce qui n’a jamais été tenté.

 

Mais attention. Avant d’en venir aux luttes qui contraindront les dirigeants à cette évolution en profondeur, il faut déjà bien se rendre compte que les questions posées ne peuvent être seulement binaires. Des évaluations doivent montrer les avantages et inconvénients des politiques proposées. Les référendums, entre autres, doivent indiquer très clairement les enjeux. Exemple, celui de Notre dame des Landes, concernant uniquement les électeurs de Loire-Atlantique, posait bien l’alternative : « "Souhaitez-vous le transfert de l'aéroport vers Notre-Dame-des-Landes ?", c’est-à-dire qu’en cas de Oui, les nantais, par exemple, perdaient bien à terme en commodité puisque l’aéroport s’éloignait, mais plus grand en revanche.

 

On revient, puisqu’on y est, sur le déni de démocratie qui nous met, on l’a dit, au niveau du Turkménistan. C’est-à-dire qu’on fait un référendum puis, dans un deuxième temps, on analyse si, peut-être, on va respecter le résultat … ou pas.

La crise majeure de la démocratie va donc, on le déplore, au-delà de la formule qui reste vraie : « élections piège à cons ». Puisqu’on a aussi « consultation c’est tout bidon ».

 

Il va donc être temps d’en venir aux luttes. Cependant, outre les référendums s’ils étaient respectés comme dans les grandes démocraties, disons que la consultation des citoyens pourrait s’exercer sous forme de panels. De même qu’on ne peut pas se récuser a priori si on est appelé pour faire partie d’un jury d’assises, les citoyens désignés par les algorithmes statistiques seraient tenus à participer, pendant trois jours par exemple, à des séminaires sur telle ou telle question. Sur une question comme la future loi sur l’euthanasie, par exemple, on pourrait rassembler 1 000 français dans 5 régions différentes jusqu’à arriver (ou pas) à une formulation de la loi que le législateur n’aurait plus dès lors qu’à appliquer. Mais, pour aller encore plus loin, Cf. encore une fois notre article « VIème république : la constitution de vos rêves ».

 

 

  1. Réalité de certaines luttes récentes et idées pour de nouvelles

 

    1.  Des luttes récentes couronnées de succès

 

Face au constat « élections piège à cons », il faut dire ici que l’on ne porte pas de jugement sur la violence de certaines de ces luttes. Elle ne fait, somme toute, que répondre au mépris des dirigeants. On va en citer trois récentes :

  • Lutte des « bonnets rouges » en Bretagne « intérieure » en 2013 pour obtenir l’annulation des portiques écotaxe. C’est un exemple à suivre de lutte associant patrons et ouvriers avec des méthodes forcément pas trop légales.
  • Lutte des guyanais pour la Guyane décoller en 2017 (Pou lagwiyann dékolé en créole de là-bas). Menée au départ sur la question de la sécurité, elle a évolué vers un blocage de la région pour demander et obtenir des moyens supplémentaires pour les services publics.
  • Lutte, en 2018 des agriculteurs du sud-ouest (notamment) pour la non remise en cause des avantages financiers liés à l’agriculture de montagne (on simplifie). On ne les a écoutés que quand ils ont réussi à bloquer Toulouse, quatrième ville de France. Tous n’ont pas obtenu satisfaction mais beaucoup oui.

 

Ces luttes démontrent que les succès d’estime de manifestations et pétitions ne servent à rien. A un moment donné, pour imposer un rapport de force, il faut faire mal. CQFD. Mais il faut aussi éviter de dresser les français les uns contre les autres pour éviter de « reproduire » Macron ; elles étaient aussi généralement acceptées dans leur contexte local.

Ceci définit d’ailleurs en creux ce que ne doivent pas être les luttes que nous approuvons : le blocage des trains et métros, notamment, car, dans les grandes agglomérations, prendre les transports en commun est déjà une épreuve quotidienne, qui est seulement encore plus épouvantable les jours de grève. Par contre, la lutte récente des gardiens de prison qui s’inscrit comme une conclusion inévitable de l’horrible loi Taubira a notre approbation car elle a, objectivement, gêné beaucoup moins de gens.

 

 

 

2.2 idées pour les luttes à venir

 

Les cadres, spécialement les familles de cadres avec enfants ont été massacrés par les hausses d’impôts intervenues entre 2012 et 2014 (hausse de 100 milliards par an des impôts sur la période). Cependant eux sont légalistes et n’ont pas de tracteurs pour bloquer les périphériques. Ils ont des voitures mais voilà, ils sont légalistes. Cela n’a toutefois pas été complètement sans effet, la CFE-CGC ayant refusé, en 2016, de signer la loi El Khomry, très largement pour dénoncer en fait ce matraquage fiscal. Mais cela n’a évidemment pas d’impact sur nos dirigeants. Comme vu ci-dessus cela ne leur fait pas assez mal.

 

Il faut donc aller vers d’autres formes de lutte, partant du principe que ceux qui se voient comme appartenant à la petite et moyenne bourgeoisie ne vont pas descendre dans la rue ni faire grève. Quels sont dès lors les moyens d’action réalistes ?

Les retraités, pour ne pas les citer, n’ont guère que leur pouvoir d’achat. Ils n’ont pour ainsi dire que cela mais c’est énorme. On propose dès lors qu’ils fassent la grève des vacances, pendant une période qui pourrait aller, par exemple du 10 juin au 5 juillet. Pas de séjours, pas d’hôtels ni restaurants, pas de péages, tout le monde reste à la maison. Dès lors, si quelques millions d’entre eux suivent la consigne, pas ou très peu d’avant saison, pas d’embauches de saisonniers en juin, et un PIB qui pique du nez à cette période de l’année. Et là, le gouvernement sera obligé de s’en rendre compte et cela fera effectivement mal.

On ne va pas (trop) se contredire en disant que ça ne gêne pas les professionnels du tourisme au sens large. Mais ce ne sont que des dépenses différées et, d’autre part, ces professionnels ont besoin aussi que les seniors ne s’appauvrissent pas. Donc tout le monde doit y trouver son compte.

 

Et pour aller au-delà ?

Pour « plomber » la conjoncture, l’autre action de grande ampleur qui peut être menée est de ne pas acheter de véhicules neufs. On pourrait, étant donné qu’on ne mobilisera forcément pas tout le monde, étaler la grève des achats sur deux mois, cette fois en novembre et décembre. Car c’est là que se joue pour une bonne part le chiffre de la croissance annuelle du PIB. Mêmes effets par rapport au secteur de l’automobile que ci-dessus.

 

On doit évoquer aussi un combat qui n’a pas réussi quant à son objet mais qui a eu tout de même un impact, on pense, majeur. Il s’agit de la stratégie de harcèlement de la Manif pour tous. Elle a consisté, en 2013, à « poursuivre » les ministres partout où ils allaient pour les interpeller. La loi n’a pas été retirée mais l’hégémonie était en train de changer de camp et la déroute des socialistes qui n’ont pas pu faire leur propagande tranquillement déjà inéluctable. Avec le résultat que l’on a vu aux élections présidentielle et législative. Cette stratégie de harcèlement des ministres devrait être continuée avec des banderoles comme « rendez-nous notre argent » ou « Stop à la pression fiscale ».

 

 

Mais, pour finir, on a évoqué l’idée d’une convergence des luttes. Sur le modèle de la manif « Jour de colère » qui a fédéré, en janvier 2014, un très grand nombre de français qui n’avaient en commun que leur rejet de François Hollande et des sociaux-libéraux. Alors disons que ce n’est pas le but recherché non plus. Notre constitution et notre loi électorale ne sont pas bonnes. Mais ce n’est pas la seule dans le monde. D’ailleurs, en 1789, il n’y a pas eu de grande manifestation nationale, mais beaucoup de combats au niveau local.

 

Donc on ne croit pas forcément au Grand soir. Mais cela n’empêche pas d’imaginer des luttes de plus en plus fréquentes et de plus en plus efficaces, avec une coordination « lâche » aujourd’hui rendue possible par les réseaux sociaux. Cette coordination de fait devrait/pourrait permettre une prise de conscience, y compris chez le personnel politique, que la démocratie véritable reste à créer. Pourrait alors émerger le candidat à la présidence de la république qui s’engagerait à mettre en place très vite la constitution de la VIème république et qui, dès lors, donnerait un sens à ce vote.

 

 

 

 

@ Serge Darré                                  mars 2018

 

 Mots clés : lutte, démocratie, élection, con, démocratie, mépris, taxes, augmentation, agriculteurs, écologie, médias, convergence, référendum, blocage, sécurité

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